La première Maison Rose, un lieu dédié aux femmes atteintes de cancers, a ouvert à Bordeaux il y a quatre ans. Devant son succès, une autre Maison Rose a ouvert ses portes à Paris, au mois de juin dernier. Fin décembre, ce lieu, qui accompagne des femmes atteintes de tout type de cancer depuis l'annonce de la maladie jusqu'à un an après la fin des traitements, et pour certaines jusqu'à la reprise d'un emploi, comptait plus de 200 adhérentes et 2600 passages, en six mois d'ouverture. A l'occasion de la Journée Mondiale contre le cancer, ce mardi 4 février, nous nous sommes rendus sur place et y avons rencontré Viviane Chelli. Cette femme de 57 ans, atteinte d'un cancer du sein pour lequel elle est suivie à l'hôpital Saint-Louis, à Paris, a trouvé ici des gens avec qui échanger et une "ambiance" qui l'aident à traverser cette épreuve.
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C’est en questionnant les femmes elles-mêmes que les fondatrices ont conçu ce lieu, comme une maison
, où l’on se sent un peu chez soi. La Maison Rose propose des soins de support, (l'ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie*), des soins esthétiques et de nombreux ateliers, de sophrologie, de nutrition, de yoga ou encore de danse pour accompagner les femmes et les aider à supporter leurs traitements. Comme Viviane Chelli, de nombreuses femmes se rendent ici pour échanger mais aussi pour s’informer sans tabou (par exemple autour d'un "apéro sexo").
Le fait de fréquenter régulièrement la Maison Rose permet de ne pas se laisser couler les jours où ça va moins bien. Viviane Chelly
Le cancer, en France et dans le monde
Le cancer touche chaque année environ 382 000 personnes de plus, en France. D'après les données de l'INCA, chez l’homme, l’incidence tous cancers
a augmenté régulièrement entre 1980 et 2005 puis a diminué jusqu’en 2010 et tend à se stabiliser depuis. Entre 2005 et 2012, le taux d’incidence standardisé est passé de 396,1 à 362,6 pour 100 000 personnes concernant la population masculine, soit une diminution de 1,3 % par an en moyenne. La mortalité masculine par cancer a aussi régulièrement diminué depuis 1980, avec une diminution qui s’est accélérée à partir des années 1990. Un bon signe donc, même si la maladie continue de concerner trop de gens.
Chez la femme, l’incidence augmente depuis 1980 mais un ralentissement de cette augmentation est heureusement observé depuis 2005. Entre 2005 et 2012, le taux d’incidence standardisé est passé de 248,8 à 252 pour 100 000 personnes en ce qui concerne la population féminine. Le taux de mortalité féminine par cancer standardisé diminue régulièrement depuis 1980.
A l'échelle mondiale, le cancer est en forte progression. Il constitue la deuxième cause de décès et a fait 8,8 millions de morts en 2015 selon l'Organisation Mondiale de la Santé. Près d’un décès sur 6 dans le monde est dû à cette maladie. Environ 70% de ces décès surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, souligne l'OMS qui assure qu'au rythme actuel, le nombre de cas pourrait augmenter de 60 % dans les deux prochaines décennies, avec les pays en développement comme principales sources de nouveaux cas, si des mesures de prévention ne sont pas prises pour ralentir sa course. Environ un tiers des décès par cancer sont dus aux 5 principaux facteurs de risque comportementaux et alimentaires: un indice élevé de masse corporelle, une faible consommation de fruits et légumes, le manque d’exercice physique, le tabagisme et la consommation d’alcool
.
Vivre avec un cancer
En 2018, le nombre de personnes de 15 ans et plus vivantes et ayant eu un cancer au cours de leur vie est de l’ordre de 3,8 millions, selon l'INCA. Leur risque de développer un second cancer est augmenté, en moyenne, de 36 % par rapport au risque de cancer de la population générale
. L’Institut a ainsi actualisé une enquête nationale menée en 2012 puis en 2014 et portant sur 4 349 personnes dont le cancer avait été diagnostiqué cinq ans auparavant. Cette étude VICAN 5 dresse un panorama de la vie après un cancer, sur le plan médical mais aussi psychologique, social et professionnel. Il en est ressorti, notamment, que 63,5% des personnes souffrent de séquelles dues au cancer ou aux traitements et que, parmi les personnes en emploi au moment de leur diagnostic, 20 % ne travaillent plus cinq ans après
. Voilà pourquoi des projets comme celui de la Maison Rose sont essentiels. La Maison Rose Paris propose d'ailleurs un dispositif de retour à l'emploi pour aider les femmes qui le souhaitent dans leurs démarches. En 2019, 80% des femmes qui se rendaient à la Maison Rose étaient touchées par un cancer du sein (même si le lieu s'adresse à toutes les femmes touchées par le cancer). On accompagne les femmes sur une trentaine d'hôpitaux différents
, explique Aurélie Benoit-Grange, directrice de la Maison Rose Paris. On a plutôt une population de femmes de 40-50 ans, en très forte dominance. La plus jeune accompagnée a 26 ans (nous avons 4 personnes accompagnées de moins de 30 ans), et les plus âgées ont 80 ans (on a deux personnes de cet âge). On est assez contentes de pouvoir accompagner les femmes peu importe leur âge, et aussi peu importe leur classe sociale. On a des personnes précaires qui nous sont envoyées par des associations, des personnes salariées, de la Fonction Publique ou encore des cadres
.
Le cancer en chiffres, en France
- 382 000 nouveaux de cas de cancers en France
- 177 400 chez les femmes. Le cancer du sein est de loin le plus fréquent devant les cancers colorectaux et du poumon.
- 204 600 chez les hommes avec majoritairement les cancers de la prostate, du poumon et colorectaux.
- Entre 2010 et 2018, la proportion d’hommes qui ont développé un cancer a diminué et celle des femmes a légèrement augmenté. Le taux de mortalité durant cette période a baissé (0,7% chez les femmes et 2% chez les hommes).
- 157 400 décès par cancer en 2018 (67 800 chez les femmes et 89 600 chez les hommes).
- En raison de l’augmentation de nouveaux cas et de l’amélioration de la survie, la prévalence totale des cancers a augmenté en 2017 avec 3,8 millions de personnes touchées (la prévalence comptabilise le nombre de personnes vivantes ayant eu un diagnostic de cancer au cours de leur vie).
- L’alcool et le tabac sont responsables respectivement de 20% et 8% des cancers incidents.
- Avec près de 1 million de fumeurs en moins entre 2016 et 2017, le tabagisme est en baisse chez les 18-75 ans.
- Chez les enfants et les adolescents, le cancer touche chaque année, en moyenne, 2 200 nouvelles personnes (1 750 chez les moins de 15 ans et 450 chez les adolescents de 15 à 19 ans en 2015).
5 ans après un diagnostic de cancer :
- 63,5% de personnes souffrent de séquelles dues au cancer ou aux traitements (fatigues, douleurs, activité physique limitée, anxiété, dépression…).
- Une personne sur cinq a perdu son emploi.
- La survie à 5 ans des enfants et adolescents atteints de cancers s'est améliorée de manière très significative ces dernières décennies et dépasse aujourd'hui 80 %.
Source : Institut National du Cancer.
Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin
Notes en bas de page
* Les soins de supports répondent à des besoins qui peuvent survenir pendant la maladie et lors de ses suites et qui concernent principalement la prise en compte de la douleur et de la fatigue, mais aussi les problèmes nutritionnels, les troubles digestifs, respiratoires et génito-urinaires, les troubles moteurs, les handicaps et les problèmes odontologiques. Ils concernent également les difficultés sociales, la souffrance psychique, les perturbations de l'image corporelle et l'accompagnement de fin de vie.
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