Le Plan santé au travail (PST) 2005-09 a permis une prise de conscience mais n'a pas suffisamment modifié les comportements en entreprises, estime le député Nouveau centre Francis Vercamer (Nord).
Francis Vercamer dresse, dans son rapport sur les crédits du travail dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2010, un bilan du premier PST en abordant également l'avenir des services de santé au travail et la lutte contre les risques psychosociaux. Ses propositions ont vocation à alimenter le deuxième Plan, qui doit être rendu public en février 2010.
Ce rapport sera discuté jeudi en séance publique lors de l'examen des crédits travail et emploi du PLF pour 2010.
Francis Vercamer souligne que le Plan 2005-09 a opéré "un changement d'échelle" dans le traitement de la santé au travail et a permis une réelle sensibilisation à la question des risques professionnels.
Il a eu un "impact institutionnel" en créant le Conseil d'orientation sur les conditions de travail (COCT) et des comités régionaux ainsi que l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset). Il relève l'élaboration en 2008 d'un "plan national d'actions 2009-12" par la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP).
Par ailleurs, l'inspection du travail a multiplié par deux ses enquêtes sur les maladies professionnelles (319 en 2008, contre 142 en 2006) et les accidents du travail (6.130 contre 3.006).
Cependant, la coordination de tous les acteurs, très nombreux au niveau national et régional, est inaboutie. Le rapporteur souligne que le COCT n'a pas les moyens de coordonner les travaux, avec seulement trois personnes mises à disposition et 200.000 euros pour réaliser des études, et que l'Observatoire de la pénibilité n'a pas été mis en place.
"Le premier Plan santé au travail a manqué d'opérationnalité en direction des entreprises", écrit Francis Vercamer en jugeant que le Plan 2009-12 doit avoir pour but "d'atteindre les entreprises et notamment les petits et moyens établissements".
Francis Vercamer s'inquiète des conséquences de la fusion de l'Afsset et de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) sur la recherche en santé au travail et a demandé un "fléchage des crédits" consacrés aux risques professionnels dans le nouvel ensemble.
Il demande aussi la formalisation des partenariats entre l'inspection du travail et les services de prévention des caisses régionales d'assurance maladie (Cram) pour "accroître la visibilité du dispositif de santé au travail".
Recentrer les médecins et les infirmiers du travail
Francis Vercamer propose des pistes d'évolution pour les services de santé au travail, après l'échec des discussions entre syndicats et patronat en septembre.
Pour faire face au manque de médecins du travail (6.915 médecins en 2008, dont 75% âgés de plus de 50 ans), il propose de déléguer des tâches aux infirmiers du travail (4.029 en 2008) et d'espacer les visites obligatoires d'aptitude au travail.
Il propose une visite individuelle tous les cinq ans avec le médecin du travail, avec une visite de contrôle à mi-parcours faite par l'infirmier. Le salarié conserverait le droit de voir le médecin à sa demande, comme l'employeur.
Dans l'accord national interprofessionnel sur la modernisation de la santé au travail -que quatre syndicats de salariés ont refusé de signer-, le patronat a proposé que la visite périodique soit effectuée tous les trois ans maximum, contre deux actuellement, pour les salariés non exposés à des risques spécifiques, lesquels bénéficieraient de visites d'infirmiers en santé au travail, rappelle-t-on.
Pour assurer l'indépendance des médecins et infirmiers du travail vis-à-vis des employeurs, Francis Vercamer propose que des "structures mutualisées" les recrutent, sur le modèle des services interentreprises, avec une compétence territoriale ou par secteurs d'activités.
Pour développer une action en réseau avec l'inspection du travail et les caisses, le rapporteur suggère de constituer par entreprise un "registre unique obligatoire de santé", regroupant la fiche enteprise déjà élaborée par le médecin du travail, le document d'évaluation des risques professionnels établi par l'employeur, les actions menées et le relevé des maladies professionnelles et accidents du travail.
Ce registre serait à la disposition des délégués du personnel et de l'inspection du travail, suggère-t-il.
Risques psychosociaux : tout reste à construire
En matière d'évaluation des risques psychosociaux, Francis Vercamer remarque que "tout reste à construire".
Des indicateurs qualitatifs et quantitatifs doivent d'abord être élaborés. Une quarantaine d'indicateurs provisoires immédiatement disponibles ont été listés en octobre par un groupe d'experts présidé par Michel Gollac, qui poursuit son travail.
Des volets information et formation des professionnels de la prévention dans et hors de l'entreprise, des ingénieurs concepteurs de procédés de travail et des directions de ressources humaines doivent également être élaborés.
Francis Vercamer soutient le développement de la négociation sur les risques psychosociaux au niveau interprofessionnel, une "intégration accrue des problématiques psychosociales dans les plans de prévention", et "la déclinaison de l'accord sur le stress au travail", prévue dans le plan d'urgence présenté par le ministre du travail, Xavier Darcos.
La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a mis en place la semaine dernière une mission d'information sur les risques psychosociaux, présidée par la socialiste Marisol Touraine (Indre-et-Loire) et dont le rapporteur est Jean-Frédéric Poisson (Yvelines).
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