La morphine ne procure pas une analgésie suffisante pour prévenir les douleurs induites par les gestes invasifs auxquels sont fréquemment soumis les nouveau-nés prématurés ventilés, indiquent les résultats d'une étude franco-américaine publiée dans la revue "Pediatrics".
Il est désormais avéré que la morphine exerce un effet analgésique permettant de soulager les douleurs prolongées, de limiter les réponses comportementales et hormonales induites par une intervention chirurgicale chez les bébés nés à terme et d'améliorer l'adaptation au respirateur et la sédation chez les prématurés ventilés. En revanche, son efficacité dans la prévention des douleurs aiguës provoquées par des actes invasifs reste mal connue, rappellent le Dr Ricardo Carbajal, du Centre national de ressources de lutte contre la douleur (CNRD), à l'hôpital d'enfants Armand Trousseau à Paris (AP-HP, XIIème arrondissement), et ses collègues français et américains.
Par ailleurs, les bébés prématurés sont non seulement capables de ressentir la douleur, mais ils y sont même particulièrement sensibles, du fait de l'immaturité et de la vulnérabilité de leur système nerveux. Et le développement du recours à des stratégies analgésiques préventives efficaces s'avère d'autant plus indispensable que la répétition des gestes douloureux semble entraîner, à terme, une hyperalgésie, soulignent les auteurs.
Leurs travaux ont visé à évaluer l'efficacité analgésique des perfusions continues de morphine pour soulager la douleur liées aux ponctions veineuses au talon chez des nouveau-nés prématurés ventilés. Ils ont été conduits dans le cadre d'un vaste essai clinique randomisé, multicentrique (mais cette sous-partie de l'étude n'a été menée que dans un seul établissement), contrôlé, contre placebo et réalisé en double aveugle, l'étude Neopain (NEurological Outcomes and Pre-emptive Analgesia in Neonates). Cette dernière a été consacrée à l'évaluation de l'impact de l'utilisation prophylactique de morphine sur l'incidence des effets neurologiques graves chez le nouveau-né prématuré ventilé.
Au total, 42 nouveau-nés prématurés ventilés ont été inclus dans ce versant de l'étude. La moitié d'entre eux s'est vue administrer une dose de charge, suivie d'une perfusion continue de morphine, tandis que les autres n'ont reçu qu'un placebo (solution de dextrose). Des observateurs indépendants ont évalué la réponse des bébés à trois ponctions au talon réalisées dans le cadre de leur prise en charge habituelle : la première avant que la dose de charge ne soit administrée, la seconde deux à trois heures plus tard, et enfin la troisième après 20 à 28 heures de perfusion continue.
Deux outils validés ont permis aux chercheurs d'évaluer la douleur ressentie par ces nouveau-nés lors de ces différentes ponctions : l'échelle comportementale Douleur aiguë du nouveau-né (DAN) et une échelle multidimensionnelle, la Premature Infant Pain Profile (PIPP). Les taux plasmatique de morphine ont également été mesurés au moment du troisième prélèvement.
L'analyse statistique des données ainsi recueillies a montré que l'évolution des niveaux des scores moyens de douleur enregistrés aux différents temps ne s'est pas montrée significativement différente d'un groupe à l'autre, quel que soit l'outil d'évaluation utilisé.
L'utilisation préventive de morphine, bien qu'elle soit largement répandue dans les services de néonatologie, ne semble donc pas procurer une analgésie suffisante pour soulager la douleur ressentie par les nouveau-nés prématurés ventilés lors de gestes invasifs, concluent les auteurs.
Selon eux, cette situation pourrait être due à l'immaturité des récepteurs aux opioïdes et/ou à un métabolisme incomplet de la morphine au niveau hépatique. Autre hypothèse : la douleur aiguë entraînerait un découplage des récepteurs s'accompagnant d'une désensibilisation.
Cependant, "ces conclusions ne s'appliquent pas à la douleur continue et elles ne doivent pas conduire à la réduction du traitement analgésique des enfants prématurés ventilés et douloureux chez lesquels la douleur constitue un facteur de risque pour une instabilité physiologique et pour des effets négatifs à long terme", préviennent-ils. En fait, ces résultats démontrent plutôt que l'administration en continu de morphine aux nouveau-nés ne dispense pas les médecins d'utiliser d'autres moyens analgésiques (par exemple les solutions sucrées) pour prévenir les douleurs liées aux gestes de soins, insistent les auteurs./mr
(Pediatrics, juin 2005, vol. 115, n° 6, p. 1.494-1.500)
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