Si l’accès aux soins est l’une des priorités affichées du gouvernement, son action ne répond pas aux besoins de la population, a visiblement jugé l’association UFC-Que choisir. Dans une étude, elle pointe de véritables inégalités d’accès, notamment dans trois domaines du soin, marqués par des manques importants : l’ophtalmologie, la gynécologie et la pédiatrie.
Entre dépassements d'honoraires et désertification, une situation devenue "catastrophique"
Pour dresser une carte des inégalités, l’association a croisé deux critères : l’éloignement géographique des médecins, les déserts étant caractérisés par une densité 60% inférieure à la moyenne pour les spécialistes situés à moins de 45 minutes de route et à 30 minutes pour les généralistes, et les tarifs pratiqués. Selon ses résultats, 19,3% de la population résident dans un désert médical pour l’ophtalmologie, 24,8% dans un désert médical gynécologique, et 28,9% dans un désert médical pédiatrique. Contactés par des bénévoles au cours de l’enquête, 28% des 761 ophtalmologues sollicités ont refusé de planifier un rendez-vous, la majorité proposant des délais d’attente de 65 jours en moyenne, à titre d’exemple. Et si l’on exclut les praticiens pratiquant les dépassements d’honoraires, « la situation devient catastrophique ». Plus d’un enfant sur 2 vit dans un lieu déserté par les pédiatres, la part de Français n’ayant pas accès à un ophtalmologue passe à 59,3%, et celle des femmes vivant dans un désert gynécologique, à 69,6%, déplore ainsi UFC. « Les dépassements d’honoraires payés par les usagers ne cessent de croître, pour atteindre 3,5 milliards d’euros par an en 2021. Pour la plupart des spécialités, il devient de plus en plus difficile de trouver des médecins qui respectent le tarif de la Sécurité sociale », ajoute-t-elle.
La répartition est un peu meilleure, quoique guère brillante, pour les généralistes : 2,6% des patients sont classés en désert médical (soit tout de même 1,7 million de personnes), auxquels viennent s’ajouter 21% de patients ayant « un accès difficile » - soit une densité de généralistes au moins 30% inférieure à la moyenne. Entre 2021 et 2023, 44,4% de la population « a vu l’accessibilité aux généralistes se dégrader », note l’association. Pourtant, en 2019, une précédente enquête démontrait que près d’un médecin traitant sur 2 refusait déjà de nouveaux patients.
Un recours et une pétition
« Sans surprise, la désertification médicale s’accentue, du fait de la hausse des besoins » et d’une « vague de départs en retraite », en conclut UFC. Dans la foulée des conclusions de son enquête, l’association a donc décidé de déposer un recours devant le Conseil d’État afin de dénoncer « l’inaction » du gouvernement face à ces inégalités croissantes d’accès aux soins. Pointant notamment « le refus obstiné des autorités de réguler l’installation des médecins », une mesure qu’embarquait le projet de loi pour l’amélioration de l’accès aux soins (dite loi Rist, mai 2023) mais qui a finalement été rejetée par les députés, l’association invite les Français à signer et « partager massivement » une pétition visant à soutenir son action en justice. « Après des années de négociations auprès des décideurs politiques qui restent sans réponse, l’UFC-Que choisir saisit aujourd’hui le Conseil d’État pour faire constater et sanctionner la coupable inaction du gouvernement ».
En parallèle, l’association soumet un certain nombre de pistes pour tenter de réduire ces inégalités : instauration d’un conventionnement territorial des médecins pour une garantir une meilleure répartition des professionnels, ou encore la fermeture de l’accès au secteur 2 (à honoraires libres), à l’origine de la multiplication des dépassements d’honoraires.
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