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Etats généraux de la psychiatrie : les professionnnels demandent un "plan d'urgence"

Publié le 10/06/2003

Psychiatres, infirmiers, psychologues et travailleurs sociaux, réunis au Corum de Montpellier de jeudi à samedi, ont voté un "plan d'urgence", des engagements et quatre motions au cours de discussions nourries, parfois enflammées.

Les organisateurs ont annoncé leur intention de présenter ces mesures très prochainement à Jean-François Mattei, lors d'un rendez-vous que le ministre s'est engagé à leur accorder, dans un message écrit parvenu samedi aux participants.

Le ministre a rappelé dans ce message qu'il attendait pour le mois de septembre les "propositions d'actions" de la mission confiée au Dr Philippe Cléry-Melin, au Pr Viviane Kovess et au Dr Jean-Charles Pascal sur la psychiatrie.

Ce plan d'urgence est "un plan de refondation de la psychiatrie basé sur des valeurs éthiques, humanistes et scientifiques" dont "la mise en oeuvre ne doit pas être différée", avec pour objectif "d'assurer des soins de qualité aux patients" que les professionnels "ont la responsabilité de soigner", indique le communiqué final de la manifestation.

La première demande, considérée comme un préalable, est la création d'un "budget national spécifique pour la psychiatrie".

Pour le secteur hospitalier public et privé participant au service public (PSPH), les demandes vont de l'augmentation du nombre de lits en psychiatrie, "des conditions d'accueil et d'hospitalisation décentes", le développement des structures extrahospitalières, la réaffirmation de la place du secteur avec un refus de sa révision par la future ordonnance sanitaire et la nomination des praticiens hospitaliers au niveau national.

En matière de moyens humains, un consensus s'est dégagé pour demander au moins une compensation de la baisse, au mieux une augmentation, du nombre de psychiatres et d'infirmiers et la création de postes de psychologues, sous un statut non précaire. Les internes en psychiatrie ont pour leur part demandé l'annulation de l'obligation des stages hors psychiatrie.

Pour le secteur privé, les psychiatres ont réclamé la réouverture de négociations conventionnelles et une "augmentation d'urgence des honoraires". Pour le secteur médico-social, il est demandé de "rétablir le temps médical", de créer des nouvelles structures adaptées aux besoins et d'agréer les avenants en suspens.

La seule revendication spécifique au secteur privé lucratif concerne l'alignement des salaires des infirmiers sur ceux de leurs collègues du public.

Enfin, les participants sont tombés d'accord pour demander des spécificités pour l'accès au dossier médical en psychiatrie et une rencontre avec l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) pour énoncer "la spécificité de la psychiatrie".

Les 12 engagements de la profession portent notamment sur l'actualisation de la nosographie française, le développement de la recherche clinique en psychiatrie, une prise en charge individualisée des patients (avec un refus des "protocoles standardisés" et des classifications comme le DSM), le maintien du secret médical, de la confidentialité des soins, la "sauvegarde de l'indépendance professionnelle" et la promotion d'une formation continue adaptée et "indépendante de l'industrie pharmaceutique".

LA PSYCHIATRIE, DISCIPLINE MÉDICALE SPÉCIFIQUE

Mais un consensus clair s'est aussi dégagé sur l'affirmation de grands principes, particulièrement applaudis, comme "la psychiatrie est une discipline médicale à part entière" ou "la psychiatrie n'est pas la santé mentale, comme la médecine n'est pas la santé", impliquant un recentrage des missions sur la prise en charge des pathologies mentales et un refus de psychiatriser les difficultés sociales.

Le terme "spécificité" est certainement le plus souvent repris d'un texte à l'autre pour parler de l'exercice de la psychiatrie et la pratique de tous les professionnels, qui ont aussi insisté sur leur champ d'action, la pathologie mentale.

Les participants ont également inclus une référence à la psychanalyse comme "apports (...) essentiels pour rendre compte de la complexité de l'engagement dans les soins" et la nécessité d'une formation à au moins une forme de psychothérapie.

Un rejet fort de la classification américaine des maladies DSM, dénoncée comme une "dérive réductionniste" ou un "scientisme" à éviter, de "toute entreprise systématique de protocolarisation des soins" a été exprimé, de même qu'une défiance forte vis-à-vis de l'administration et du pouvoir administratif.

A cet égard, la demande d'arrêt immédiat, voire d'abandon, du PMSI (données statistiques sur l'activité de soins) en psychiatrie apparaît comme l'expression du rejet d'une procédure ressentie comme totalement inadaptée à l'exercice de la psychiatrie./hm


Source : infirmiers.com