Le mouvement francilien de protestation contre le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) s'étend en dehors de l'Ile-de-France, s'est félicité mercredi Bernard Granger, responsable du mouvement de défense de l'hôpital public (MDHP) lors d'une conférence de presse.
Le MDHP, l'intersyndicale des personnels de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (CFE-CGC, CFTC, CFDT, SUD, USAP-CGT, FO), le Syndicat des internes des hôpitaux de Paris (Sihp) et le Syndicat des chefs de clinique-assistants des hôpitaux de Paris (SCCAHP), l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH), la Confédération des praticiens des hôpitaux (CPH) et le Syndicat de la coordination nationale des médecins hospitalo-universitaire (SCNMHP) ont appelé les personnels hospitaliers à une journée de grève et de manifestation mardi 28 avril pour la défense de l'hôpital public et pour s'opposer au projet de loi HPST.
Ils demandent que la loi soit amendée et que des états généraux soient convoqués pour élaborer une vraie réforme de l'hôpital et du système de santé.
"De nombreuses villes ont voté des motions qui rejoignent la nôtre partiellement ou totalement", a rapporté Bernard Granger, citant Nice, Lille, Nancy, Caen, Toulouse et Marseille. Il a précisé que des personnels hospitaliers de ces villes, notamment de Marseille, participeront à l'action parisienne.
A Paris, le cortège des manifestants partira mardi à 11 heures de la place du 18 juin 1940, au pied de la tour Montparnasse, puis passera à proximité du ministère de la santé et s'arrêtera sur la place Paul Claudel près du Sénat.
Une assemblée générale est organisée mercredi à 18 heures afin de finaliser l'organisation de la journée d'action, de faire le point sur la mobilisation et d'envisager un durcissement du mouvement au cas où le gouvernement ne répondrait pas aux revendications.
Pour Bernard Granger, il y a une convergence qui s'installe entre le mouvement des médecins pour la défense du service public et celui des enseignants-chercheurs.
Une quinzaine de représentants d'organisations ayant appelé au mouvement se sont exprimés mercredi pour expliquer les raisons de leur participation en reprenant les mots d'ordre déjà évoqués, notamment le maintien des services, le refus des suppressions d'emplois à l'AP-HP prévues dans l'état des prévisions des recettes et des dépenses (EPRD) 2009 et l'opposition à la réforme de la gouvernance prévue dans le projet de loi HPST avec le renforcement du pouvoir des directeurs.
La secrétaire générale de l'Union des syndicats de l'Assistance publique (Usap) CGT, Rose-May Rousseau, a observé qu'il y avait une "convergence de lutte" entre les représentants du personnels et ceux des praticiens pour dénoncer la "logique de rentabilité" contenue dans le projet de loi qui risque de dégrader la qualité des soins.
Pour le représentant de la CPH, Bruno Devergie, la ministre de la santé a fait une "faute politique majeure" en ne prenant pas en compte la "sévérité de la crise de l'hôpital public" et en n'ayant pas compris que les hôpitaux étaient au bord de l'"explosion sociale".
Le Pr André Grimaldi, chef de service de diabétologie à l'hôpital La Pitié-Salpêtrière à Paris (AP-HP), a souligné que les médecins étaient prêts à faire évoluer l'hôpital mais la réforme précédente, qui avait associé les médecins à la gestion de l'hôpital, n'ayant été ni achevée ni évaluée, ils ont eu le "sentiment de recevoir un coup de poignard dans le dos".
Il a expliqué que le mouvement pouvait sembler tardif car les médecins espéraient que des modifications auraient été apportées au texte lors de son passage à l'Assemblée nationale. Le mécontentement s'est également amplifié avec le retrait d'un amendement déposé par le député UMP Bernard Debré (Paris), ce qui a supprimé la nécessité d'un avis conforme du président de la CME et du directeur de l'unité de formation et de recherche (UFR) dans les CHU sur la définition de l'organisation de l'établissement en pôles d'activité par le directeur.
Pour le Pr Grimaldi, le mouvement a un caractère "unique" car les organisations de personnels médicaux et non-médicaux partagent les mêmes revendications.
Le Pr Christian Richard, président de l'Intersyndicat des médecins, chirurgiens et biologistes des hôpitaux de Paris, souhaite que le mouvement n'apparaisse pas comme "caricatural" de l'opposition contre les directions d'établissement. Pour lui, le patient bénéficiera de la poursuite d'un travail en commun des directeurs et des médecins. "Si on casse aujourd'hui cette tentative de travail en commun, il est clair que les médecins s'éloigneront pour longtemps de ce type de responsabilité", a-t-il ajouté.
Le vice-président de la Coordination des médecins hospitalo-universitaires, François Piette, a expliqué que sa présence traduisait l'"étendue de l'exaspération" car c'est la première fois qu'il se déclarera gréviste et manifestera avec son service.
Plusieurs représentants ont également insisté sur leur opposition au transfert de l'AP-HP sous la tutelle de la future Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France.
Un directeur d'hôpital, qui travaille au siège de l'AP-HP, a également fait part de ses critiques sur le projet de loi, notamment sur l'ouverture des chefferies d'établissement à des personnes qui ne sont pas directeur d'hôpital.
La Coordination nationale infirmière (CNI) a indiqué lundi dans un communiqué qu'elle s'associera également au mouvement. Elle revendique l'"attribution d'effectifs au regard de la charge de travail réelle, adaptée à une prise en charge de qualité".
"UN MOUVEMENT TRES PROFOND", SELON DIDIER TABUTEAU
Le directeur de la chaire santé de Sciences Po, Didier Tabuteau, a estimé par ailleurs mercredi lors d'un débat sur la régionalisation de la santé, que ce mouvement de protestation contre le projet de loi HPST correspondait à "un mouvement très profond" au sein du monde hospitalier qui a connu plusieurs réformes en un temps limité, en particulier celle de la mise en place de la tarification à l'activité (T2A).
Il considère que le projet de loi HPST, qui n'a pas fait l'objet selon lui d'une concertation assez longue avec les acteurs, constitue un "catalyseur" de ce mouvement de protestation "profond" et qui "s'inscrit dans le temps". Il pense que le projet de loi HPST va déplacer "le pouvoir vers le couple ARS/directeur d'hôpital plutôt qu'un pouvoir autonome au sein de l'hôpital".
Le président du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), Christian Saout, a commenté lors de ce débat le mouvement de protestations des médecins hospitaliers contre le projet de loi HPST estimant qu'il y avait souvent "une confusion", certains critiquant des mesures, comme l'allocation de ressources, qui ne figurent pas dans le projet de loi. Il s'est demandé si les médecins mènaient "une bataille pour défendre leur pouvoir ou la qualité de soins".
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