Le ministère des Solidarités et de la Santé dévoile le contenu de sa stratégie 2022-2025 de lutte contre l'antibiorésistance. De la vaccination des professionnels de santé contre la grippe à la réduction de la consommation d'antibiotiques, en passant par la communication grand public sur l'hygiène des mains, elle s'orchestre en 42 actions prédéfinies et table sur la mobilisation de tous pour son déploiement.
Prévenir les infections courantes (bronchites, gastro-entérites...), réduire le risque d’infections associées aux soins et préserver l’efficacité des antibiotiques : tels sont les grands enjeux de ce plan national alliant étroitement les actions de prévention et contrôle des infections à celles promouvant le bon usage des antibiotiques. Car c’est en prévenant les infections et en réduisant la transmission des agents infectieux et gènes de résistance que nous diminuerons l’incidence des infections communautaires et associées aux soins, mais aussi le risque d’antibiorésistance
fait entendre Olivier Véran, dans le communiqué de presse de lancement.
Le développement de l’antibiorésistance est identifiée par l’Organisation Mondiale de la Santé comme l’une des menaces majeures pour l’humanité. En effet, de plus en plus souvent, les infections courantes et celles associées aux soins impliquent des bactéries devenues résistantes aux antibiotiques, compliquant la prise en charge des patients et augmentant le risque de décès. La France était en 2019 le quatrième pays d’Europe qui consommait le plus d’antibiotiques, avec une consommation près de 3 fois supérieure à celle des pays les plus faibles consommateurs.
Cette stratégie de prévention constitue, dans ce contexte, la déclinaison opérationnelle en santé humaine de la feuille de route interministérielle 2016 Une seule santé
pour la maîtrise de l’antibiorésistance, qui lie santé humaine, animale et des écosystèmes. Maîtriser le risque d’infections, notamment celles à bactéries résistantes aux antibiotiques, est à notre portée si nous modifions nos comportements. Pour ce faire, nous nous fixons des objectifs ambitieux à l’horizon 2025, à commencer par la réduction de la consommation d’antibiotiques en ville en France de 25% par rapport à 2019, leur dispensation à l’unité ou encore l’intensification drastique de l’hygiène des mains
, insiste le ministre de la Santé.
Des gestes simples, une mobilisation collective et 43 indicateurs d'action
Le renforcement de l’éducation à la santé dès le plus jeune âge, l’utilisation de ressources en ligne ludiques et pédagogiques, les campagnes de promotion grand public, le renforcement de la formation des professionnels de santé, une plus large diffusion des bonnes pratiques et des informations sont autant de leviers pour déployer cet ambitieux plan qui se déclinera pour les quatre ans à venir selon 9 grands axes, à travers 43 indicateurs de suivi et d'impact.
Axe 1 : L’appropriation par le grand public des principes de la prévention des infections et de l’antibiorésistance
Celle-ci passe par l'acquisition et le maintien d'un socle de connaissances sur les grands principes de la prévention des infections (en particulier pour l’hygiène des mains, l’hygiène respiratoire, la vaccination) et la contribution des citoyens à l’évaluation des usagers du système de santé au cours et à la suite de leur prise en charge. devront également être acquises les grandes notions de prévention de l’antibiorésistance et de non usage des antibiotiques.
Axe 2 : L'assurance d'une continuité entre le citoyen usager et le professionnel de santé
Tout personnel, notamment les professionnels de santé et du secteur médico-social devra avoir acquis et maintenir un socle de connaissances sur les infections et les moyens de prévention : connaissances générales, prévention de la transmission croisée dont les précautions standard et complémentaires, prévention des infections liées aux actes invasifs, vaccination, mécanismes d’apparition et de transmission de l’antibiorésistance et grands principes de bon usage des antibiotiques.
Axe 3 : Un renforcement de la prévention des infections et de l’antibiorésistance auprès des professionnels de santé tout au long du parcours du patient
Tout personnel et professionnel de santé devra améliorer ses pratiques dans la prévention et contrôle de l’infection et le bon usage des antibiotiques, que ce soit à l’aide des différents outils ou dans le cadre de la mise en place de programmes d’actions tout au long du parcours santé du patient.
Axe 4 : Un renforcement du maillage territorial de la prévention et du contrôle de l’infection et du bon usage des antibiotiques
Les structures régionales (CRAtb et CPias) en charge de développer les actions de prévention des infections et de l’antibiorésistance en région seront opérationnelles et coordonnées par les agences régionales de santé (ARS).
Axe 5 : Une utilisation partagée des données de santé et de surveillance au service de l’action
Les données de surveillance des antibiothérapies (volume et pertinence), des infections communautaires et des infections associées aux soins seront interprétées et accessibles aux professionnels concernés et au grand public. Elles guideront les actions de prévention, d’information et de formation. L’évaluation de l’impact de ces actions cible la transmission croisée des microorganismes (notamment les bactéries multi et hautement résistantes aux antibiotiques), la prévalence et l’incidence des infections associées aux soins (notamment celles liées aux actes invasifs) ainsi que le volume et la pertinence des antibiothérapies.
Axe 6 : Développer une recherche innovante en matière de prévention, contrôle des infections et de bon usage des antibiotiques.
Axe 7 : Développer une dimension préservation de l’environnement
dans les actions de prévention
Axe 8 : Valoriser et préserver les produits contribuant à la prévention des infections et à la maîtrise de l’antibiorésistance
Les vieux antibiotiques resteront disponibles et l’arrivée sur le marché des nouveaux produits luttant contre l’antibiorésistance sera facilitée.
Axe 9 : Participer au rayonnement de la France à l’international en matière de lutte contre l’antibiorésistance
Un relais essentiel au niveau régional et local
Si cette stratégie prévoit des actions pilotées au niveau national, elles doivent être appuyées, relayées et déployées au niveau régional et local dans le but d’obtenir, à terme, une couverture nationale la plus homogène possible et un impact réel et durable. L’ARS décline en région la stratégie nationale. Les structures régionales en charge de développer les actions de prévention des infections et de l’antibiorésistance en région seront pilotées et coordonnées par les ARS. Avec l’appui des centres régionaux et la mobilisation de l’ensemble des acteurs de tous les secteurs d’activités et des représentants d’usagers, l’ARS pilotera et coordonnera la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation des actions définies. Elle élaborera aussi, si besoin, des actions spécifiques à la région.
Une évaluation attendue du Haut Conseil de la santé publique
Suite à une saisine par le ministère des Solidarités et de la Santé, cette stratégie nationale 2022-2025 sera évaluée par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) en deux temps. Tout d'abord afin d'une appréciation préalable à sa mise en œuvre portant sur la faisabilité et l’utilité de son évaluation.
Dans un second temps, le HCSP effectuera une évaluation in itinere
tout au long de son déploiement opérationnel.
En complément de cette évaluation , un rapport annuel des actions menées sera rendu public par le ministère des Solidarités et de la Santé, incluant les indicateurs de suivi et d’impact.
Sur le plan européen, une conférence ministérielle sur l’antibiorésistance sera organisée le 7 mars 2022 dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union Européenne. Elle constituera l’opportunité pour la France d’affirmer son engagement au côté des autres pays européens en matière de maîtrise de l’antibiorésistance.
Pour en savoir plus : Stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l'antibiorésistance
Betty MamaneDirectrice de la rédaction betty.mamane@gpsante.fr
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