En fonctionnement depuis 2011, le Dossier médical personnel (DMP) représente un réel défi pour les infirmiers libéraux. Quel impact l’utilisation de cet outil au quotidien a-t-il sur leur travail ? Quels avantages apporte-t-il, mais aussi quels inconvénients ? Voici les premiers retours d’expérience.
Créé afin de réunir toutes les informations de santé d’un patient au sein d’un document informatisé, le Dossier médical personnel (DMP) est aujourd’hui utilisé par 4800 professionnels de santé libéraux. Il a été lancé en avant-première dans quatre régions « test » de France : l’Alsace, l’Aquitaine, la Franche-Comté et la Picardie. Plusieurs dizaines de professionnels de santé, dont des infirmiers libéraux ont donc pu commencer à manier cet outil. Aujourd’hui, en Franche-Comté, une centaine d’infirmiers l’utilisent
confirme Nicolas Schinkel, chargé de mission télésanté auprès de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS) Infirmiers de Franche-Comté.
Un consentement indispensable
Avant de pouvoir utiliser le DMP d’un patient, il faut pouvoir le créer. Les infirmiers libéraux sont les premiers acteurs de cette communication, afin de promouvoir cet outil. Pourtant à l’heure actuelle, seuls 350 000 DMP ont été créés. Dominique Natale, présidente de l’URPS Infirmiers Franche-Comté déplore un manque de communication au niveau national. A notre échelle, nous sommes confrontés à très peu de refus
, assure-t-elle. Pour ma part, sur 230 patients auxquels j’ai pu proposer le DMP, seuls un vieux monsieur et un couple l’ont refusé
. Un consentement indispensable donc, pour lancer la création de ce dossier. Celle-ci ne se réalise pas encore au domicile du patient, c’est l’infirmier qui récupère sa carte vitale et s’occupe de son ouverture, sur ordinateur, à son cabinet. Pour des raisons de sécurité, le professionnel de santé doit également s’identifier grâce à sa carte CPS (carte de professionnel de santé) (cf. encadré). La démarche est très rapide, cela ne prend qu’une minute
explique Nicolas Schinkel. Le patient aura ensuite une petite étiquette collée sur la carte vitale, signalant qu’il possède désormais son DMP. En revanche, l’annulation de ce dossier informatisé n’a pas été prévue. Si un patient veut revenir en arrière, le DMP sera simplement mis en veille
précise-t-il. Pas question donc, de supprimer un dossier créé.
Un véritable atout dans la prise en charge du patient mais…
L’infirmier libéral reste souvent extérieur
à la prise en charge médicale d’un patient, en établissement de santé ou à l’hôpital. Nous devons aller à la pêche aux informations, car il arrive que le patient sorte avec une simple ordonnance de pansements, par exemple, et nous n’en savons pas plus
déplore Nicolas Schinkel. Le DMP pallierait donc ce manque de communication entre les structures de soins et les professionnels de santé libéraux. Le but à terme, en effet, est de supprimer tout document papier, afin d’obtenir pour chaque patient un dossier complètement informatisé
poursuit Dominique Natale. L’objectif étant une prise en charge globale, sécurisée et optimisée du patient
.
Un objectif qui semble relever de l’utopie pour le moment, selon Annick Touba, présidente du Sniil, le Syndicat des infirmiers et infirmières libéraux. Effectivement, l’infirmière libérale est encore trop souvent réduite à un rôle d’
. Le DMP a donc un rôle à jouer, Annick Touba est bien d’accord, mais elle émet des doutes sur son usage. exécutante
, il lui faut donc bien souvent rechercher les antécédents et autres pathologies de son patient auprès du médecin traitantPour être utiles, les DMP doivent d’abord être remplis !
.
… Encore trop peu utilisé
C’est bien là l’une des limites de ce dossier informatisé. Pour un fonctionnement optimal, il est nécessaire que chaque professionnel de santé (médecin, infirmier mais aussi kinésithérapeute, laborantin, radiologue…) participe à son remplissage, pour obtenir un dossier complet. Une difficulté reconnue par Cyril Lepeut, de l’URPS infirmier de Franche-Comté : Nous sommes des pionniers dans l’utilisation du DMP, les autres professionnels de santé sont autant de potentiels utilisateurs à convaincre, bien sûr. Mais nous sommes motivés, nous allons continuer et nous verrons si cela suit
. Une tâche loin d’être terminée, la France comptant plus de 87 000 infirmiers et infirmières libérales au 1er janvier 2012.
Sihem BOULTIF Journaliste sihemboultif@gmail.com
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