Créée en septembre dernier et réunissant 11 syndicats représentant les professions de santé libérales (les CDF, la CSMF, la FFMKR, la FNI, la FNO, la FNP, la FSPF, le SDA, le SDB, le SML et le SNAO), l’intersyndicale Les Libéraux de santé a présenté le 10 février les grandes lignes d’un projet de réforme, qu’elle souhaite soumettre aux candidats de la présidentielle, pour transformer le système de santé en profondeur. Un système qui va mal, a-t-elle martelé, avec un hôpital à bout de souffle et une médecine de ville grande oubliée du Ségur de la santé, alors même qu’il est confronté à d’importants défis de santé (vieillissement de la population, augmentation des maladies chroniques, face à la pénurie de personnels…). Ce projet ambitieux, se décline en 6 axes principaux (coordination, formation, numérique, prévention, cadre conventionnel, qualité des soins) et entend redonner de la visibilité à l’offre de soin.
Les ESCAP, un nouveau mode de coopération simplifié autour du patient
Première condition au renforcement de ce virage ambulatoire : une meilleure coordination entre les différents professionnels de ville. Les Libéraux de santé réclament une reconnaissance par la loi des Équipes de Soins Coordonnées Autour du Patient (ESCAP). Les modes de coordination existants (Maisons de santé (MSP) ou des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS)) sont effectivement soumis à des cadres réglementaires jugés trop lourds et peu attractifs. Seuls 15% des professionnels libéraux exerceraient ainsi en MSP. Or, à la différence de ces formes de coordination, qui répondent à des besoins de santé d’un territoire ou d’une patientèle spécifique, les ESCAP se construisent autour du seul patient. Plus précisément, chaque patient pourrait disposer de sa propre ESCAP, composée des professionnels de santé (médecin traitant, infirmier, pharmacien, dentiste…) qu’il aurait choisi, sans qu’ils exercent nécessairement au sein d’une même structure. Le besoin de coordination serait identifié par un soignant qui mobiliserait ensuite les autres professionnels de santé, dont obligatoirement un médecin référent. Les temps consacrés à la coordination faisant, quant à eux, l’objet d’une valorisation financière. D’abord réticente au projet, l’Assurance maladie a annoncé fin décembre 2021 l’ouverture de négociations autour d’un accord cadre, prévues pour le début de l’année 2022.
Pour exister, ces ESCAP auront toutefois besoin d’un outil numérique sécurisé pour faciliter la communication entre les différents professionnels de santé. L’intersyndicale entend ainsi s’inscrire dans l’accélération du virage du numérique en santé, porté par le lancement de « Mon espace santé » . Avec une ambition : pouvoir y intégrer leur outil afin qu’il soit accessible à tous les professionnels libéraux. Des discussions sont en cours sur le sujet avec le ministère de la Santé. Plus largement, l’organisation voit dans le numérique en santé un moyen de pallier les inégalités d’accès aux soins, à condition de résoudre les problématiques liées à la fracture numérique. Elle réclame notamment de démocratiser l’intégration de la télémédecine dans les parcours de soins.
Renforcer la prévention
Autre axe identifié pour transformer le système de santé : passer d’un système presqu’exclusivement curatif à un système de prévention en santé. Les Libéraux de santé proposent ainsi de mettre en place des rendez-vous spécifiques à des âges-clés
(entre 16 et 17 ans, entre 40 et 45 ans, et au moment de la retraite). Avec un objectif : détecter le plus tôt possible les problématiques de santé afin de construire des parcours thérapeutiques adaptés pour chaque patient. Dans un contexte de vieillissement croissant de la population corrélé à l’augmentation du nombre de pathologies chroniques, l’enjeu est en effet de taille. Cet axe est à mettre en parallèle avec une autre ambition : garantir la qualité des soins pour tous. Lutter contre les « fake med » et la désinformation, qui a pris d’importantes proportions, renforcer le caractère obligatoire de la vaccination pour les professionnels de santé, redéfinir les organisations afin de les fluidifier sont autant de pistes que les Libéraux de santé entendent défendre.
Soutenir l’attractivité des carrières
Il s’agit enfin de renforcer l’attractivité des différentes professions du secteur, tant du point de vue de l’évolution des carrières que du point de vue financier, notamment afin de prévenir la fuite des professionnels. La première doit d’une part être soutenue par l’accès à la formation. L’intersyndicale demande, à titre d’exemple, un décloisonnement entre les professions dès la formation avec la création de passerelles entre les cursus. Mais cette ouverture à l’évolution suppose aussi le soutien au transfert de compétences, qui peut conduire aux reconversions professionnelles au sein du secteur. Pour autant, martèle l’intersyndicale, le dispositif doit être correctement encadré pour éviter que certaines compétences spécifiques d’une profession ne soient pas captées par une autre. Elle réclame donc des espaces de concertation communs ainsi que le lancement d’une réflexion globale sur le contour de chaque métier.
Quant à l’aspect financier, les Libéraux de santé montent au créneau pour exiger entre autres un rééquilibrage des forces entre l’Assurance maladie et les représentants syndicaux lors des négociations conventionnelles. Ils proposent notamment que le déclenchement de ces dernières puisse être effectué aussi bien par l’une ou l’autre des parties, et que les conventions signées au niveau national priment sur celles décidées en local. La question est d’autant plus importante qu’elle est corrélée aux possibilités de transferts de tâches, afin qu’ils ne s’effectuent pas au détriment de la sécurité économique des professionnels. L’ensemble de ces propositions feront l’objet d’une présentation plus détaillée à destination des candidats à la présidentielle lors du prochain Conseil économique, social et environnemental (CESE), prévu le 30 mars prochain.
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