Cette année encore, les coûts de la rentrée ont augmenté pour les étudiants en soins infirmiers (ESI). C’est ce que constate la Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières (FNESI), qui dresse une estimation de leurs dépenses en début d’année universitaire. Le coût moyen de l'année s’élève ainsi pour 2024-2025 à 3 354, 26 euros. Soit une augmentation de 5,38% par rapport à l’année précédente, où la FNESI indiquait déjà une hausse des coûts de plus de 8% par rapport à 2022.
Le coût des études infirmières particulièrement en hausse
Tous les étudiants, quelle que soit leur filière, sont touchés par cette augmentation. Dans son baromètre 2024 publié mercredi 4 septembre, la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) note en effet que les frais d’inscription pour les étudiants ont augmenté de 3%, passant à 175 euros (+5 euros par rapport à 2023) pour la licence, à 250 euros (+7 euros) pour le master, et 391 euros (+11 euros) pour le doctorat. En cause : le dégel des frais d’inscriptions en mai dernier et leur indexation sur l’inflation, que la FNESI dénonçait comme un facteur d’aggravation de la précarité étudiante.
De fait, l’ensemble des études infirmières sont particulièrement impactées par ces augmentations, aussi bien la formation socle que les spécialités : +7,5% pour les étudiants puériculteurs (3 001,95 euros) et pour les étudiants infirmiers en pratique avancée (2 782,08 euros), +6,99% pour les étudiants infirmiers anesthésistes (2 977,59 euros), et +7,75% pour les étudiants infirmiers de bloc opératoire (3 020,02 euros).
Des frais complémentaires en moyenne de 480 euros
Il faut d’abord compter sur les frais de rentrée universitaire, entre frais d’inscription de 175 euros pour la formation socle, donc, et contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) de 103 euros. Auxquels s’ajoutent encore des frais « complémentaires », dont la plupart sont illégaux, dénonce la FNESI. Parmi eux, peuvent en effet figurer des frais pédagogiques, tel que l’achat d’ouvrages souvent onéreux, pour un total chiffré à 191 euros, et des outils ou du matériel à utiliser durant les stages (telles que montre trotteuse et paire de ciseaux), en plus du reste des fournitures. En tout, ces frais complémentaires s’élèvent à 483,30 euros, soit une augmentation de 0,80% par rapport à 2023. « Ainsi, le matériel pédagogique représente 14,41% du total des dépenses d’un·e étudiant·e en sciences infirmières, le faisant ainsi arriver en deuxième position après les frais de loyer », affirme la FNESI.
A l’exception des frais d’inscription et de CVEC, aucun autre frais ne peut être exigé de manière obligatoire dans les établissements de formation publics
Autre poste de dépense : l’achat de tenues professionnelles, qui doivent normalement être fournies par les terrains de stage. En moyenne, en comptant l’achat de 3 à 4 tenues, un étudiant infirmier devra dépenser près de 70 euros pour la rentrée 2024.
Ce n’est pas la première fois que la Fédération alerte sur ces pratiques, qui viennent précariser un peu plus les étudiants. Car depuis la parution de l’arrêté du 23 janvier 2020, à l’exception des frais d’inscription et de CVEC, « aucun autre frais ne peut être exigé de manière obligatoire, dans les établissements de formation publics (ceux privés n’étant pas soumis à cette interdiction) », rappelle-t-elle. Selon elle, 77 établissements de formation mettraient encore en place des frais complémentaires pour la rentrée 2024.
Des frais de santé toujours trop élevés
Parallèlement à ces coûts, les ESI sont aussi contraints de s’acquitter d’une dépense supplémentaire : celle liée à la consultation médicale et à la délivrance d’un certificat par un médecin agréé, obligatoire pour pouvoir entrer en formation. Or « la tarification de la consultation n’est pas cadrée et n’est pas remboursée par l’Assurance maladie », relève la FNESI, avec des coûts qui oscillent entre 25 et 90 euros en fonction des territoires. La situation est d’autant plus irritante qu’il existe des solutions pour faciliter l’accès à une visite médicale gratuite, et que la Fédération ne cesse de mettre en avant : recours à la médecine du travail, qui « gère aujourd’hui les consultations d’aptitudes à l’exercice professionnel pour les nouveaux·elles employé·e·s d’un établissement de santé et médico-social », conventionnement de l'université avec la médecine de ville pour que les étudiants puissent faire réaliser cette visite par leur médecin traitant, ou encore sollicitation du service de santé étudiante – à condition qu’il puisse être rendu accessible pour les étudiants en instituts de formation en soins infirmiers (IFSI), souvent éloignés géographiquement des sites universitaires. Mis en place en mars 2023, ceux-ci sont au nombre de 62 sur le territoire et ont pour mission de dispenser des soins de premier recours, de faire de la prévention, mais aussi de prendre en charge conduites addictives, santé sexuelle, ou encore santé mentale.
Les étudiants infirmiers subissent une précarité alimentaire grandissante, exacerbée par l’inflation et le manque d’adaptation des aides sociales.
Point essentiel également : le coût de la santé mentale. Dans sa précédente enquête sur la santé et le bien-être des ESI (2022), la FNESI relevait que 61,4% d’entre eux jugeaient qu’elle s’était dégradée après leur entrée en formation. Par manque de professionnels de santé, le dispositif « Santé Psy Étudiant », qui prévoit jusqu’à 12 séances gratuites avec un psychologue, n’a qu’un impact limité. Les ESI choisissent alors de s’orienter « vers des consultations payantes. En moyenne, le coût d’une séance chez un·e psychologue s’élève à 64€ », affirme la Fédération. Nombre d’étudiants renoncent alors tout simplement à ce type de soins.
Logement, déplacement, alimentation...en augmentation
Enfin, viennent les frais de la vie courante, eux aussi soumis à une augmentation générale. Premier poste de dépenses, le coût associé au logement atteint en moyenne 1 469 euros (en comptant le loyer, l’assurance, les frais d’agence et le dépôt de garantie), soit une hausse de 5,43% par rapport à 2023. L’éloignement croissant des terrains de stage, dû à l’augmentation du nombre des effectifs étudiants pour un quota de stages qui n’a pas évolué au même rythme, entraîne par ailleurs des frais kilométriques croissants, estime la FNESI. Et qui pèsent d’autant plus sur le budget des étudiants. Or les indemnités de stage, toujours inférieures à ce qui est observé dans les autres filières universitaires, ne permettent d’absorber ces dépenses. Conséquence : « Les ESI subissent une précarité alimentaire grandissante, exacerbée par l’inflation et le manque d’adaptation des aides sociales. Pour beaucoup d’entre eux·elles, l’alimentation devient la principale variable d’ajustement dans un budget déjà serré », déplore la FNESI. Or la précarité alimentaire, alerte-t-elle, est une problématique de santé publique ; elle réclame que les étudiants puissent, a minima, avoir accès à la restauration à tarification sociale et très sociale (respectivement 3,30€ et 1€).
Toujours selon l’enquête de la FNESI de 2022 sur le bien-être et la santé des ESI, la précarité étudiante serait la troisième cause d’arrêt de la formation.
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