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TFE - "Les émotions de l’étudiant infirmier face à la mort"

Publié le 10/01/2018
infirmière stéthoscope

infirmière stéthoscope

En juin 2017, Gillie Ziane, alors étudiante en soins infirmiers à l'Institut de Formation en Soins Infirmiers Croix Rouge de Calais - promotion 2014-2017 - a soutenu avec succès son travail de fin d'études sur la thématique suivante : « Les émotions de l’étudiant infirmier face à la mort ». Elle souhaite aujourd’hui le partager avec la communauté d’Infirmiers.com et nous l'en remercions.

Que peut ressentir l’étudiant infirmier face à la découverte d’un corps inerte ?

Voilà comment Gillie nous explique le choix de sa question de recherche. « La situation se passe dans un EHPAD lors de mon stage de semestre 3. Monsieur C est un résident de 86 ans que je prends en charge et à qui je réalise les pansements d’ulcères tous les deux jours. Monsieur C est une personne assez renfermée qui n’exprime que peu ses émotions et a du mal à accepter son état de santé. Il est amputé d’une jambe et reçoit une aide pour ses soins d’hygiène et ses déplacements. Durant mes dernières semaines de stage, monsieur C n’était plus réceptif aux soins, refusait souvent ses traitements, ne participait plus aux repas au restaurant de l’établissement et était parfois agressif, il voulait qu’on « le laisse tranquille » et rester en chambre. L’infirmière discuta avec monsieur C et sa famille pour leur faire comprendre l’importance des soins et celle de continuer à voir du monde mais monsieur C n’était pas réceptif. Au fil des jours, l’état de monsieur C se dégrada, il ne se levait plus, ne parlait plus, ne mangeait plus et s’hydratait peu, il refusait les soins et la prise de traitements. La famille et l’équipe soignante s’étaient rendu compte de son état, : il présentait un syndrome de glissement diagnostiqué par son médecin traitant, il voulait mourir. La famille expliqua aux infirmières que monsieur C ne voulait pas d’acharnement thérapeutique, la décision de mise en place des soins palliatifs fut alors prise. Du fait que le résident ne voulait plus manger, il fallut le perfuser pour lui apporter des apports nutritifs. L’infirmière et l’aide-soignante réalisaient sa toilette chaque jour, les changements de protection et de position. Pour ma part, je me rendais dans la chambre de monsieur C pour l’hydrater avec de l’eau gélifiée pour vérifier s'il présentait des douleurs pouvant être exprimées par des gémissements ou des expressions faciales et pour changer la poche de la perfusion. Il m’arrivait de rester un moment avec lui afin de lui apporter une présence et lui parler.

Monsieur C n’était pas réceptif. Au fil des jours, l’état de monsieur C se dégrada, il ne se levait plus, ne parlait plus, ne mangeait plus et s’hydratait peu, il refusait les soins et la prise de traitements.

Le 20 Janvier 2016, en faisant le tour de distribution des médicaments du matin avec l’infirmière M, une aide-soignante E., qui réveillait les résidents, entra dans la chambre de monsieur C et en sortant nous interpella et nous dit discrètement que ce dernier était décédé. A ce moment, l’infirmière et moi nous sommes dirigées dans sa chambre et avons également constaté le décès de ce résident. Dans la nuit, l’aide-soignante présente était passée à plusieurs reprises dans sa chambre mais monsieur C était décédé entre son dernier passage et notre arrivée au matin. Je suis restée sans réaction devant l’équipe car je ne voulais pas montrer mes émotions mais, intérieurement, la vision de ce corps inerte m’a bouleversé. L’image est restée gravée longtemps dans ma mémoire. C’était la première fois que je voyais une personne décédée durant ma formation mais également au cours de ma vie et ce corps froid, pâle, raide et sans vie m’a rendu triste. L’infirmière et l’aide-soignante quant à elles, paraissaient tristes mais ne semblaient pas choquées, peut être parce que le résident était une personne âgée et que ce décès n’était pas le premier qu’elles vivaient au cours de leur expérience.

Je suis restée sans réaction devant l’équipe car je ne voulais pas montrer mes émotions mais, intérieurement, la vision de ce corps inerte m’a bouleversé.

L’infirmière expliqua qu’elle devait contacter le médecin pour constater le décès, puis la famille. L’aide-soignante nous dit qu’elle allait faire la toilette mortuaire. Je me suis proposée de l’effectuer avec elle car, malgré mon mal être intérieur à la vue du corps de monsieur C, j’ai voulu connaître la manière d’accompagner, jusqu’à la fin, une personne décédée. Cette étape du « prendre soin » une dernière fois d’une personne avec qui des liens se sont créés a été éprouvante pour moi. Cependant, une fois de plus, je n’ai pas exprimé mon ressenti. Suite à cette situation, je me suis alors posée plusieurs questions :

  • Que peut ressentir l’étudiant infirmier face à la découverte d’un corps inerte ?
  • Le vécu de l’étudiant infirmier a-t-il un impact sur ses émotions ?
  • Quelle est l’importance d’avoir des connaissances et une formation pour mieux gérer une situation de fin de vie ?
  • Les soins palliatifs auraient-ils pu permettre à l’étudiant infirmier d’appréhender la mort ?- L’encadrement par les professionnels pourrait-il permettre à l’étudiant infirmier de se préparer à une situation de fin de vie ?
  • Comment peut être perçue la réalisation de la toilette mortuaire par l’étudiant infirmier ?
  • Peut-on apprendre à gérer ses émotions ?
  • L’étudiant infirmier ne peut-il pas exprimer son ressenti auprès de l’équipe ?
  • L’expérience professionnelle permet-elle aux soignants de se forger un caractère ?

Ces différents questionnements m’ont amené vers une question de départ : « En quoi l’expérience de l’étudiant infirmier peut-elle influencer ses émotions face au décès d’une personne âgée en EHPAD dans un contexte de soins palliatifs ? »

Lire le TFE – « Les émotions de l’étudiant infirmier face à la mort » (PDF)

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com