Les jeunes mères françaises tendent à allaiter plus longtemps et en plus grand nombre leur bébé, selon une vaste étude publiée mardi 23 juillet par l'agence Santé publique France. «En 2021, la moitié des mères qui allaitaient leur enfant l'a fait pendant 20 semaines, contre 15 en 2012», résume cette étude, menée à partir d'une enquête auprès de quelque 3 500 mères. «À 6 mois, si moins d'un quart des nouveau-nés était encore allaité en 2012, plus du tiers l'était en 2021», ajoutent les auteurs de ce travail. Ces chiffres incluent les situations d'allaitement mixte, c'est-à-dire où il s'accompagne de prise de lait artificiel au biberon.
A 2 mois, le fait de trouver le biberon plus pratique (y compris le souhait de faire davantage participer le père) et l’insuffisance ressentie de la production de lait maternel (sans que celle-ci ne soit objectivée par une baisse effective de poids du nouveau-né) sont les deux principales causes d’arrêt de l’allaitement (concernant dans les deux cas 76% des mères ayant arrêté). Les problèmes liés à la mise au sein (57%) et les problèmes d’organisation et de manque de temps (54%) sont également invoqués par plus d’une femme sur deux. Ces résultats rappellent l’importance de l’accompagnement des mères par des professionnels bien formés, autant pour l’initiation de l’allaitement que pour sa poursuite.
Une progression est aussi notable dès la période suivant la naissance. A la maternité, 77% des femmes ont allaité leur enfant en 2021 contre 74% une dizaine d'années plus tôt. Par ailleurs, 9 enfants sur 10 débutent la diversification alimentaire pendant la période recommandée (entre 4 et 6 mois).
Un bon suivi des recommandations alimentaires
Concernant la diversification alimentaire, l’étude montre que les recommandations en matière de diversification sont de plus en plus suivies ; mais certains aliments sont néanmoins introduits plus tardivement que ce qui est recommandé :
- La diversification alimentaire débute dans la fenêtre recommandée, entre 4 et 6 mois, pour 91% des enfants en 2021.
- Seulement 4% des mères ont commencé la diversification avant la période recommandée.
- Quelques aliments restent néanmoins introduits plus tardivement que recommandé par une partie importante des mères interrogées (matières grasses ajoutées, légumes secs, œufs).
Le manque de données sur l’alimentation du jeune enfant et les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS) ont conduit Santé publique France à mettre en place un système de surveillance de l’alimentation et de l’état nutritionnel du nourrisson et du jeune enfant pour permettre de :
- décrire les pratiques en matière d’allaitement et de diversification alimentaire
- contribuer à l’évaluation des politiques de santé publique
- orienter les actions de promotion de l’allaitement et les recommandations pour une alimentation plus adéquate du jeune enfant.
L’étude Epifane s’inscrit ainsi dans cette surveillance. Menée une première fois en 2012, Santé publique France publie aujourd’hui les résultats de la deuxième édition menée en 2021.
Accroitre la formation des professionnels de santé
La deuxième édition de l’étude Epifane montre des résultats satisfaisants et une évolution positive en matière d’allaitement et de nutrition chez les jeunes enfants, depuis la première édition en 2012. Néanmoins, la France reste très en retrait en matière d’allaitement par rapport aux autres pays européens, qui se situent pour la plupart au-delà de 80% d’allaitement à la naissance, selon les dernières données disponibles sur le sujet. L’Irlande, avec moins d’une femme sur deux qui allaite à la sortie de la maternité, est le seul pays européen, avec Chypre et Malte, à afficher des taux d’allaitement inférieurs à ceux de la France.
Les raisons de cette situation défavorable de la France sont probablement multiples, note l'enquête. Ceux-ci vont de la possible insuffisante durée des congés maternité à l’insuffisante formation des professionnels de santé et des employeurs en matière d’accompagnement des femmes souhaitant allaiter, en passant par l’image peu valorisée de la femme qui allaite et les informations contradictoires reçues sur l’allaitement et l’alimentation du jeune enfant.
De façon globale, les résultats de cette deuxième édition d’Epifane soulignent la nécessité :
- D’accroitre la formation des professionnels de santé susceptibles d’apporter soutien et conseils aux familles et d’informer et former les employeurs ;
- De rendre lisible et cohérente l’information en matière d’allaitement et d’alimentation du jeune enfant auprès des parents ;
- De poursuivre les actions de soutien et d’accompagnement à l’allaitement, notamment auprès des femmes qui initient un allaitement pendant leur séjour à la maternité mais qui l’interrompent très précocement, et de faciliter le recours aux consultantes en lactation.
Pour consulter les résultats de la deuxième édition de l’étude Epifane : Alimentation des nourrissons pendant leur première année de vie. Résultats de l’étude Épifane 2021
Déroulement de l’enquête
Menée en 2021 auprès de plus de 3 500 mères en France hexagonale, la deuxième édition de l’étude Epifane a été réalisée à partir d’un échantillon de femmes recrutées dans l’Enquête nationale périnatale (ENP).
Les objectifs de l’étude Epifane 2021 sont de décrire l’alimentation des enfants, leur état de santé et de développement, l’état de santé des mères, et leur environnement.
Cette étude permet notamment de décrire :
- la fréquence, la durée et l’exclusivité de l’allaitement ; l’utilisation des préparations pour nourrissons du commerce ;
- les modalités de la diversification alimentaire ;
- certains indicateurs de la santé post-néonatale (croissance, statut vaccinal, exposition au tabagisme passif…) ;
- certains indicateurs de l’état de santé des mères, leurs habitudes de vie et leur environnement et leur niveau de littératie en santé (santé mentale, maladie chronique, attachement à l’enfant, consommation d’alcool et tabac, violences au sein du foyer…).